Les graisses animales en saponification
La saponification artisanale ouvre de multiples possibilités de design à travers les couleurs, les odeurs, les motifs, les formes… Mais un savon c’est avant tout de la mousse et de la douceur et pour cela il nous faut choisir les bonnes matières premières pour avoir LE savon qui nous enchantera.
Lorsque nous fabriquons nos savons nous abordons souvent les huiles végétales ou encore quelques beurres, parfois nous faisons des ajouts de cire. Historiquement, les savons étaient fabriqués à partir de cendres de bois, d’eau et de graisses animales comme le suif ou le saindoux. De nos jours les savons sont plus souvent réalisés avec des huiles végétales (plus d’affinité avec notre peau), cependant ces graisses animales restent encore un atout pour certaines savonnières.
Bon à savoir : Le savon est donc le résultat d’une saponification, réaction chimique au cours de laquelle des corps gras (végétal ou animal) sont hydrolysés en présence de soude ou de potasse. N’hésitez pas à consulter notre article sur les savons.
Les graisses animales peuvent être solides comme le suif ou le saindoux ou bien fluides comme le lait ou la crème fraîche.
Les produits laitiers
Ces graisses animales sont obtenues par écrémages du lait des animaux laitiers, tels que le beurre et la crème fraîche. Bien que portant la dénomination de « graisse animale », leur mode d’obtention prête moins à polémique.
Le lait et la crème fraîche sont couramment utilisés à la trace ou encore en liquide de dilution, ils apportent beaucoup de douceur et de crémeux aux savons.
Bon à savoir : il existe des laits animaliers (vache, brebis, chèvre, ânesse) mais également des laits végétaux (coco, avoine, amande…) lors d’un essai croisé nous avions comparé ces différents laits dans une saponification à froid : Lait vs soude
Les graisses animales
Ces graisses animales sont obtenues après avoir fondu le tissu graisseux chez les animaux d’élevage. En savonnerie on les utilise généralement pour apporter de la douceur et du crémeux. Outre la mauvaise réputation qu’elles peuvent avoir, les graisses animales ont 2 inconvénients :
– Elles ont tendance à accélérer la trace.
– Exposées à l’air, ce type de graisses animales subit un phénomène d’hydrolyse et d’oxydation qui provoque leur rancissement. Les savons contenant un fort pourcentage de graisse animale sont donc sensibles à l’oxydation.
Attention, si vous utilisez des graisses animales pour une saponification à chaud, elles se décomposent et peuvent répandre une odeur âcre et irritante
L’info en plus : Les graisses animales servent également en parfumerie : « L’enfleurage est une technique employée et qui permet de traiter des fleurs fragiles (comme les fleurs de jasmin) qui conservent leur odeur après la cueillette mais qui ne supportent pas la chaleur. La graisse inodore employée est souvent de la graisse animale raffinée. Elle est étalée sur les deux faces en verre d’un châssis en bois. Après avoir été soigneusement triées, les fleurs sont piquées délicatement dans la graisse. Tous les jours, on retourne les châssis pour faire tomber les fleurs qui ont « cédé » leur essence aux lipides et on les remplace. La graisse absorbe l’odeur des fleurs pendant trois mois, jusqu’à saturation. Par cette méthode, 1 kilo de graisse peut absorber le parfum de 3 kilos de fleurs. »
Extrait du site Wikipédia
La graisse de bœuf : Le suif
INCI : Sodium tallowate
Le suif est la graisse animale la plus utilisée dans les savons industriels. Il donne un savon dur de couleur gris-crème à jaune-crème.
Le suif comestible issu du premier jus est une graisse solide de couleur blanche à jaune pâle et presque inodore lorsqu’il est « frais ».
La meilleure qualité de suif comestible est le premier jus, graisse concrète de couleur blanche ou jaunâtre, presque inodore lorsqu’elle est de préparation récente.
La graisse de cochon : le saindoux
INCI : Adeps Suillus ou encore Sodium lardate
Le saindoux est une graisse comestible, solide ou semi-solide de texture molle et crémeuse, avec une couleur blanche obtenue à partir de tissus adipeux des cochons. La plupart des saindoux sont désodorisés, parfois les industriels ajoutent des produits antioxydants pour prévenir du rancissement.
Le saindoux est utilisé en savonnerie pour faire des savons ménagers, mais il est également connu pour donner beaucoup de douceur et un touché « satiné » aux savons. Riche en acide palmique, le saindoux peut être une alternative à l’huile de palme et permet de réaliser des savons d’un blanc éclatant.
La graisse de canard
INCI : pas d’information sur le sujet.
La graisse de canard est utilisée pour donner de la dureté et un côté « laiteux » aux savons. Certaines savonnières trouvent que la graisse de canard laisse une odeur peu agréable dans les savons.
L’info en plus : Nous abordons ici les graisses animales, attardons nous quelques instants sur la graisse de notre corps. Alors que les beaux jours arrivent, les magasines commencent à regorger de régimes miracle pour nous faire culpabiliser sur nos réserves de graisse mais il ne faut pas sous-estimer le rôle des graisses dans l’organisme humain et animal. Sa fonction principale est le stockage d’énergie, mais la graisse, en mauvais conducteur, permet de nous protéger du froid, et protège nos organes des chocs.
L’utilisation des graisses animales en savonnerie peut être sujet à polémique. Les convictions que l’on peut avoir ne peuvent cependant pas exclure les propriétés qu’elles apportent aux savons.
N’hésitez pas à nous faire part de vos expériences !
Sources :
– LA FABRICATION DU SAVON, Aspects techniques, économiques et sociaux de Lisette Cauberg Ed. ATOL
– Graisses et huiles animales ou végétales; produits de leur dissociation, issu de http://www.douane.gouv.fr
– http://webpeda.ac-montpellier.fr
Gardez l’œil sur :
Pour bien commencer : sécurité et matériel
Les colorants en saponification
Questions épineuses sur la saponification
Technique de dilution de la soude
Très intéressant, Nessie. J’adore utiliser le lait battu et le lait de chèvre en liquide de dilution , le savon est vraiment très cremeux …
Natalia
bonjour
fascinée par les recettes de Nessie, j’ai « copié »…une des recettes « l’appel au printemps » et ce fut pour moi
un pas de géant dans l’aventure de la savonnerie car j’ai eu un savon d’une incroyable douceur, pendant la douche et bien après…ce qui me semble important et comme par hasard…10 parts il n’en reste pas!!!!!
donc hier j’ai refait la même recette en couleur et j’adore cette recette elle me correspond fan du saindoux.
la blancheur en plus!!!! c’est pour moi la recette idéale.
bises
Les véritables savons de Marseille ne contiennent pas de graisse animale, c’est ce qui permet de reconnaitre un vrai d’un faux par exemple !
Merci Nessie de réhabiliter les graisses animales. J’aime aussi beaucoup la douceur apportée par le saindoux. J’aimerai bien tester avec le suif pour voir s’il y a une différence mais je n’en ai jamais trouvé (en version cosmétible déjà préparée).
Bonjour !
J’ai récupérer du saindoux chez des amis suite à la « préparation » d’un cochon de ferme. J’ai mélangé 500g de saindoux avec 100g de coco et 200 d’huile d’olive.. J’attends de pouvoir tester mais ils sont en effet bien blanc.
Ma question : y a t’il un risque du fait qu’il s’agisse d’un saindoux « maison ».
Aussi pour la graisse de canard, peux on utiliser la graisse obtenue lors de la cuisson de magrets par exemple pour l’utiliser en saponification ?
J’ai déjà essayé la graisse de canard, je confirme qu’elle accélère la trace, elle donne des savons plutôt blancs et une belle mousse à grosses bulles, j’adore !
Merci pour cet article plein d’infos Nessie !
Bonjour à toutes !
Natalia, je n’ai pas encore essayé le lait battu mais j’aime beaucoup le lait de chèvre en liquide de dilution. Je trouve que les savons sont plus doux.
Maïté, je suis ravie que cette base au saindoux te plaise, il est vrai que ce savon est tout doux.
Stéphanie, le savon de Marseille est effectivement 100% végétale, tout comme le savon d’Alep ou encore le Castille. Cependant certains industriels utilisent des graisses animales pour baisser le cout de production mais en gardant les appellations. Si l’on ne veut pas utiliser de savon contenant des graisses animale, il est important de décrypter les étiquettes et connaître les INCI.
Timutisa, les graisses animales n’ont malheureusement pas toujours bonne réputation mais c’est à chaque savonnière de faire son choix, et les savons au saindoux font des savons très doux.
Amélie, la graisse de canard c’est pour bientôt ! As tu essayé le suif ?
Non Nessie, je n’ai pas essayé le suif, en fait je n’ai essayé que la graisse de canard parmi toutes ces graisses. Qu’as-tu pensé du suif ? Ça donne une mousse à grosses bulles aussi ?
Bonjour Nessie,
En lisant la liste d’ingrédients du savon qui m’accompagne depuis quelques années (Speick) j’ai noté la présence de sodium tallowate.
Je n’ai aucune opposition de principe à la présence de graisses animales (d’autant plus s’il s’agit de « recyclage » de graisses qui seraient jetées/incinérées si elles n’étaient pas saponifiées) mais je m’interroge quant à leur impact écologique et dermatologique.
Sont-ils moins « bons » pour la peau que les savons végétaux?
Sont-ils plus dangereux pour l’environnement suite à leur utilisation?
J’imagine qu’utiliser ces graisses est plus écologique dans l’absolu que la culture d’oléagineux ou autres.
J’espère que tu pourras m’apporter des réponses.
Bisous
Lionel
Bonjour Lionel !
Le « sodium tallowate » qui est présent dans la composition de ton savon est du suif normalement malheureusement il parait que certains industriels utilisent du suif ou du saindoux sous la même appellation.
Cela mis à part, je ne peux pas dire que les savons à base graisses animales sont moins bons que les savons 100% végétaux. Pour ma part je trouve que certaines graisses animales apportent indéniablement un plus ou plutôt une différence à mon savon.
Sincèrement je n’ai pas d’argument scientifique à opposer à l’utiliser des graisses animales, je respecte tout à fait les personnes qui ne souhaitent pas les utiliser mais pour notre peau ou notre environnement il n’y a pas d’impact négatif connu. Contrairement à l’utilisation de certains végétaux comme le palme par exemple.
Il n’y a qu’une solution Lionel, réaliser toi même tes savons ! Tu sauras précisément ce que tu mets dans ta formule 😉
A bientôt
Merci Nessie, je continuerai donc d’utiliser des savons au suif!
Mes tentatives n’ont jamais été concluantes pour le moment (notamment mes premiers savons, catastrophiques, à l’HE d’orange et au beurre de cacao :(). En plus j’ai peur de m’abimer les mains à cause de la soude résiduelle et du coup je n’ose jamais les essayer…
Lionel
Je débute à peine et j’ai bien l’intention de tester les savons au saindoux-doux-doux. Merci pour cet article très intéressant. En ce qui me concerne, aucune objection à l’usage de graisses animales si ce n’est qu’on ne sait pas comment elles sont raffinées et quelles horreurs chimiques elles contiennent. Déjà sans doute pas mal d’antibios dont les cochons sont bourrés dans les élevages… J’espère en trouver du bio un jour !
PS : quelqu’un a-t-il déjà utilisé du beurre (du bête beurre de lait de vache hein, du beurre « de cuisine ») ? Quel est son indice de saponification ?
L’indice de saponification du beurre est dans une fourchette de 215-235. Sur les calculateurs vous pourrez peut-être le trouver sous « butter fat »
Sinon voici un lien sur le site internet d’Irène (une petite perle ce blog) : http://www.terra-amata.com/akimiti/archives/2434
Belle journée
Bonjour Wildfires,
L’utilisation de graisses animales dans les savons apportent réellement un plus à nos savons.
Si cela peut vous rassurer, il est tout à fait possible de réaliser votre saindoux dans votre cuisine. Vous devriez trouver différents tutoriels de cuisine sur internet. Vous pouvez également prendre du porc issus d’élevages biologiques qui devraient répondre à vos critères.
Belle journée
Afin de conserver et d’optimiser le côté « atelier » et « tout fait maison », je suggère aux les personnes qui souhaitent utiliser les graisses animales d’abattre eux mêmes les bêtes, ou bien d’aller les retirer directement à l’abattoir le plus proche de chez eux (en y passant découvrir la tradition ancestrlae d’abattage). Une fois que ces personnes auront vidé les bêtes de tout leur sang dans leur baignoire, puis découpé soigneusement les membres, elles pourront alors commencer à récupérer la graisse particulièrement naturelle (les bêtes, assez bêtes et inutiles, dénuées de sensibilité, sont faites pour être engraissées dans des élevages à seule fin de l’utilité qu’elles sont pour l’humanité), et la transformer à leur guise. Cela donnera au final à leur peau toute la beauté recherchée, reflet du respect tradition nature !
Bonjour Namsadhu,
Nous respectons tout à fait votre position concernant l’usage des graisses animales dans les produits « faits-maisons ». A chacun de faire ses choix dans l’utilisation par exemple du saindoux ou du lait dans un savon.
Belle journée
Fin de la discussion